Nous vous avions écrit hier à 1h du matin, sous génois partiellement enroulé avec un ris, frais et pimpants, attendant patiemment l’habituelle bascule de vent qui nous ferait empanner. Le moins que l’on puisse dire c’est que tout ne s’est pas passé comme prévu ! Nous avons été rattrapés sans prévenir par un gros grain dont les premières rafales du sud-est (un vent que nous n’avions jamais vu en 14 jours) à près de 25 nœuds nous ont rapidement envoyés dans les choux, cap droit vers les pingouins du Spitzberg! Le tout bien sûr dans une mer formée et rapidement accompagné d’une pluie torrentielle qui donne envie de sortir manœuvrer! Après une rapide évaluation de la situation la cause est entendue; ce n’est pas cette nuit que nous allons gagner des milles! S’agissant de notre premier grain, le capitaine ne maîtrise pas encore les subtilités des bascules de vent qui ne manqueront pas de suivre au cours des prochaines heures au fur et à mesure de l’avancée du grain. Plutôt que de s’aventurer à de nombreuses manoeuvres de nuit par vent fort et mer agitée pour gagner quelques milles, décision est donc prise de nous mettre à la cape courante et de laisser passer l’orage, charge à Éole de clarifier ses intentions avant la reprise de notre route. La grand-voile est rapidement affalée, le génois bordé à contre et la barre bloquée, les écoutilles sont toutes fermées et Ar Goanak part en plongée! La cape courante est très confortable, le bateau bouge peu et nous pouvons attendre et nous reposer sans inquiétude. Dehors c’est une autre affaire; pluie diluvienne et rafales à 30 nœuds… Trois heures plus tard, 5h du matin, le grain est passé, nous refaisons surface! Le vent est tombé à quelques nœuds, il vient de l’est sud-est, ce qui ne correspond à aucune prévisions… la nuit est noire d’encre, nous décidons d’allumer le moteur pour terminer la nuit. « Demain il fera jour! » Au lever du jour, il fait presque beau, le vent est toujours au sud sud-est et s’est légèrement renforcé à une dizaine de nœuds, nous faisons route droit sur Cayenne sous GV haute et génois! Une belle journée en perspective? Oui oui.. A peine trois heures plus tard, une autre masse sombre apparaît au loin sur notre bâbord. Le capitaine fait prendre deux ris préventifs. Après une demi-heure de tergiversations « il vient sur nous ou on passe à côté ? » il n’y a plus de doutes, nous sommes dedans. Ce nouveau grain est moins fort que celui de la nuit, nous poursuivons notre route vers Cayenne sous 2 ris et un génois à 50%, vent de travers avec des pointes à 25 noeuds tout de même. Cette fois nous tirons notre parti de la pluie tropicale qui l’accompagne, tout le monde prend sa douche dans le cockpit! Une fois ce deuxième grain passé, nouvelle pétole et nous sommes ballotés par les vagues, nous allumons le moteur une heure avant de hisser de nouveau nos voiles, le temps pour le vent de se rétablir à l’est nord-est, direction bien connue de l’équipage qui reprend le cap habituel au 200-210 en quittant la route directe vers Cayenne (snif). Dernière nouvelle de cette longue journée, nous apprenons par nos copains du Poulpe (oui c’est bien le nom de leur bateau) qui font la même route que nous et que nous joignons par téléphone satellite que les courants de la côte guyannaise portent loin au large et que nous y sommes déjà exposés depuis quelques jours, parfois jusqu’à 1,5kn dans le nez! C’est donc notre prochain défi pour ces derniers jours de navigation et nous le ressentons déjà, le bateau passant difficilement la barre des 4 nœuds cet après-midi… Il nous reste un peu plus de 200 milles à parcourir, nous espérons arriver vendredi en fin de journée ou samedi matin, ce qui tombe bien car le capitaine veut entrer dans le fleuve Mahoury de jour et à marée montante. A demain L’équipage et ses équipiers