Cinquième jour sans grain, on frise l’exceptionnel! Mais c’est agréable de naviguer sans passer sa journée à lever les yeux en se disant « pour nous celui-là ou pas pour nous? ». En tout cas, ça faisait bien longtemps que ça ne nous était plus arrivé et on ne boude pas notre plaisir.
La nuit dernière, empannage et tentative de route directe vers Panama, le génois fasseyait sans cesse et on s’est vite retrouvé dans les choux, droit sur la pointe colombienne que l’on veut éviter… mais en même temps il fallait bien faire un choix car continuer vers le nord-ouest, c’était aussi nous rallonger la route. Or, vu la météo, ce serait quand même bien d’être sorti de la zone avant mercredi prochain si on veut éviter de passer plusieurs jours dans 30kn de vent.
Alors pour concilier route directe et voiles qui portent, on a d’abord tenté la méthode académique: trois ris dans la GV pour laisser le gé nois respirer. Peine perdue, on n’arrive pas à se mettre suffisamment dans le sens du vent pour passer au large de cette satanée pointe, le génois claque violemment dès qu’une vague nous pousse un peu à l’abattée, ce n’est pas tenable.
Le capitaine n’est pas d’accord pour un génois seul, le cul du bateau chasserait en permanence sous l’effet de la houle croisée qui commence à bien nous secouer, ce serait invivable à bord et le pilote serait trop sollicité.
Finalement, c’est donc la méthode non conventionnelle que nous retenons; deux ris dans la GV comme d’habitude mais un génois réduit de moitié, voire de 70%. On arrive comme ça à se mettre à 140° du vent sans fasseyer, et comme le vent est assez fort (15-20kn apparents), on ne perd pas trop en vitesse. Le bateau reste assez équilibré pour que chacun n’ait pas besoin de manger le contenu de son assiette par terre. Bref, les puristes auront surement quelque chose à redire, mais vu d’ici on à validé !
Nous voilà donc (enfin) lancés sur une route directe vers l’archipel des San Blas (encore 680milles quand même) en passant à plus de 100 milles de la Colombie pour éviter autant que possible surventes et mer agitée. Ce soir on s’offre même le luxe d’un cap un quelques degrés plus au nord (on sait jamais ça peut servir s’il faut les rendre plus tard).
Tout ça ne nous empêchera probablement pas de passer quelques heures dans des vents forts mardi et mercredi prochain, mais ça ne devrait pas durer et on aura minimisé autant que possible les conditions les plus rudes.
Si tout va bien, nous entrerons avec soulagement dans la pétole mercredi soir ou jeudi prochain, pour une dernière journée de moteur jusqu’à destination.
L’équipage est toujours aussi en forme, Augustin progresse bien en lecture; aujourd’hui il a lu « badaboum »; « ah oui! comme nous dans le bateau! »
Hélie pionce, mange et sourit, c’est peu mais on ne demande pas mieux.
A demain
L’équipage