Après nos déboires dans le Rio Chagres, nous sommes arrivés jeudi dernier à la marina de Shelter Bay, dans la baie de Colon, en attente de la séance de « mesure » du bateau par les officiels du canal (dont l’objectif est davantage d’ajouter un motif de facturation et de rappeler que le pilote doit être correctement nourri à bord…). Nous l’espérions vendredi dernier … ce sera peut-être demain (mardi) si tout va bien. Une fois cette formalité effectuée, notre agent règlera le canal et nous pourrons alors demander notre date de passage. Nous sommes en fin de saison, les délais d’attente sont donc courts et nous espérons passer d’ici la fin de la semaine.
Nous aurons à bord un pilote accrédité du canal ainsi que deux « handliners » mis à disposition par notre agent. Il faut en effet quatre adultes en plus du skipper et du pilote pour tenir les amarres de chaque côté du bateau et les ajuster au fur et à mesure de la montée, puis de la descente des écluses du canal. (Lorsque nous aurons notre date et heure de passage, vous pourrez d’ailleurs nous voir en direct sur les webcams du site officiel du canal, tout petit derrière ou devant les monstres d’acier!). Ca se passera ici: Multimedia | Panama Canal Authority (panama-canal.com)
Avant cela nous avions brièvement jeté l’ancre dans la baie de Portobelo, un peu plus à l’est, puis longé les zones de mouillage des monstres qui attendent le passage du canal pour rejoindre le Rio Chagres. Passer à quelques encablures de ces dizaines de porte-containers, tankers, supertankers et autres paquebots est impressionnant! Nous n’en menons pas large et rasons la côte!
La préparation du bateau est bien avancée, le support de pilote automatique a été renforcé comme prévu et le répartiteur de charge de l’alternateur a été remplacé. Le moteur a été entièrement vérifié et tout est en ordre pour le départ ! Beaucoup de sueur pour un peu de sérénité, on connaît la chanson …
Concernant le pont, nous avons conclu un accord amiable avec le chantier. Ce n’est pas optimal bien sûr car cela ne règle pas nos problèmes mais cela nous permet de clore le dossier et de garder l’esprit au voyage. Le chantier a été suffisamment réglo pour reconnaître indirectement ses torts et accepter notre proposition, c’est déjà assez rare pour être souligné, l’affaire est donc terminée. Nous étudierons en Polynésie les différentes options pour réparer, en sachant qu’il serait préférable de tout faire refaire si nous voulons repartir vraiment sereins … bref, le sujet sera pour plus tard, d’ici là le bateau est suffisamment costaud pour que nous puissions nous engager dans le Pacifique.
Nous profitons pour le moment de ces quelques jours de marina qui font du bien à tout le monde après trois semaines à bord et surtout avant un mois de mer! Les enfants retrouvent des copains de leur âge et passent l’essentiel de leur journée à la piscine de la marina. Les parents profitent aussi des copains, des rencontres et de l’ambiance (chaleureuse et éclectique!) des pontons. On recharge les batteries avant de s’élancer dans l’immensité du Pacifique. Nos copains de Vagabond sont eux déjà arrivés de l’autre côté après 26 jours de navigation et toutes les conditions rencontrées, on espère bien suivre leur trace et voir nous aussi les terres marquisiennes à l’horizon dans quelques semaines !
Samedi nous avons accueilli à notre bord Mathilde, notre équipière pour la transpacifique ! Après une reconversion professionnelle, elle espère trouver un emploi d’expert-comptable à Tahiti. Elle a découvert la voile tardivement mais y a tellement pris goût qu’elle a enchaîné les navigations et les formations ces dernières années. Nous sommes donc très heureux de pouvoir compter sur son dynamisme et ses compétences pour nous épauler pendant cette longue traversée !
Nos copains de Vaïté ainsi que leurs voisins sud-africains finissent de réparer les dommages de la foudre (qui aura endommagé une petite dizaine de bateaux de la marina). Cela leur aura pris plus d’un mois d’attente, de tractations avec les assurances et de travaux…. avec les hauts et les bas qui accompagnent ces fortunes de mer. Nous nous rendons compte avec eux qu’une grande majorité de voyageurs au long cours partagent les mêmes moments de doutes, de difficultés, de déception, de démotivation que nous avons aussi pu expérimenter pour plusieurs raisons. Il y’a tellement d’investissement derrière ces choix de vie que les mêmes questions se posent alors face à l’imprévu ; est-ce qu’on arrête ? pourquoi fait-on cela ? Que fera-t-on une fois arrivés là-bas ? d’ailleurs, y arrivera-t-on ? Rares semblent être ceux à qui tout sourit et qui vivent le voyage comme une idylle permanente. On oublie trop facilement que la vie en mer est avant tout rude et exigeante, et qu’elle n’a pas d’état d’âme, ni avec les équipages ni avec les bateaux, même les plus récents, les plus costauds ou les mieux préparés. On reste et restera toujours tout petits face aux éléments, alors on ne se projette pas trop sur la suite, à chaque jour suffit sa peine, et on apprend à profiter des petits plaisirs de chaque jour, qui heureusement ne manquent pas pour nous encourager à continuer l’aventure !
A bientôt
L’équipage